Mémoire

Sur cette page nous abordons l’importance du travail de la mémoire dans le retour à l’autonomie alimentaire du territoire. Pourquoi du retour? Tout simplement parce qu’il y a moins de 60 ans, nos communes étaient déjà presque toutes en autonomie alimentaire par la production locale de la nourriture en circuits courts. Aujourd’hui pour retrouver cette autonomie perdue, il importe de réunifier les pratiques respectueuses de la nature dans le domaine agricole – meilleures connaissances que l’on possède sur la planète à ce sujet, comme on peut le voir en permaculture -, avec la mémoire de ce que les terroirs pouvaient offrir comme richesses en matière de biodiversité maraîchère et fruitière.

Nos amis anglais à Todmorden ont bien compris l’importance de ce travail avec en plus la nécessité de faire se rapprocher les générations entre elles, c’est à dire les jeunes avec les anciens, les habitants de la campagne avec ceux de la ville, les gens modeste avec les autres de catégories sociales. A titre d’exemple, vous pourrez voir et écouter les témoignages des anciens collectés sur une page du site Incredible Edible Todmorden consacré au travail de la mémoire sur la voie de l’autonomie alimentaire. Pour ce faire, cliquer sur le lien ICI (en anglais). Sur cette page, vous verrez la rencontre qu’il y a eu avec Freda et Malcom Heywood, deux anciens de la commune qui ont expliqué comment à l’école en 1940, les enfants apprenaient l’art du jardinage pour produire de la nourriture pendant la période de guerre (la photo ci-dessus en témoigne).

Ce qu’il a d’intéressant à retenir dans ce travail de mémoire, est la proposition de collecter des photos anciennes avec en plus, d’enregistrer les témoignages de nos aînés, de sorte à transmettre aux générations futures les connaissances particulières de chaque territoire à la fois dans ses pratiques agricoles, mais aussi dans l’inventaire de ce qui était cultivé et consommé en tant que variété légumière et fruitière.

Prenons un autre exemple concernant la ville de Detroit (en illustration sur cette photo). Si vous avez vu le film DEMAIN, vous avez pu remarquer que l’ancienne cité industrielle de Detroit aux États Unis qui a fait faillite en 2011, s’est fixée pour objectif d’atteindre son autonomie alimentaire à l’horizon 2020 grâce à l’agriculture urbaine, avec la participation citoyenne à grande échelle dans la ville.

Ce que l’on connait moins, est l’histoire d’Hazen S. Pingreen, le maire de la ville qui, en réponse à la grave crise économique de 1892 à 1897, a lancé le plan des parcelles de pommes de terre : “Potato patch plan”. On peut  considérer ici que Detroit faisait déjà l’expérience de la révolution de l’agriculture urbaine avant l’heure pour avoir lancé un vaste projet agricole communautaire visant à transformer la ville en jardin potager géant et gratuit pour nourrir la population. Comme vous pouvez en découvrir l’histoire résumée sur Wikipedia en lien ICI.  Cette initiative du maire de Détroit, très décriée au début par les notabilités locales, fut un succès. En l’espace de quelques années, 6000 parcelles de pommes de terre ont été cultivées dans la ville permettant de nourrir les familles nécessiteuses. Le “potato patch plan” de Pingreen a été reconnu au niveau national comme le champion des déshérités.

Aujourd’hui, pour revenir à notre actualité, la pauvreté est toujours présente dans nos villes. Elle s’est même amplifiée avec la crise économique comme en témoignent les files d’attente qui augmentent aux “Restos du cœur”. Pourquoi continuer dans ce sens, alors qu’il peut être produit des légumes en quantité en cultivant la terre partout où c’est possible? De plus, aujourd’hui avec les techniques révolutionnaires de la permaculture, on découvre que l’on peut obtenir d’excellents rendements sur de toutes petites surfaces, avec moins d’efforts que par ce moyen il n’est pas nécessaire de retourner la terre.

Les enjeux d’autonomie alimentaire en 2017 ont changé par rapport à ceux d’il y a 100 ans, voire même 50 ans en arrière, car actuellement on assiste à un effondrement de la biodiversité et une déconnexion d’une grande partie de la population, de la terre nourricière et des ses agriculteurs. Ceux-ci vivent pour beaucoup, des situations douloureuses pour maintenir leur activité et nourrir les villes. Il y a urgence d’aller à la rencontre de nos paysans pour les soutenir et également, de réactiver la mémoire de notre héritage maraîcher et fruitier de sorte à régénérer la biodiversité de nos territoires. C’est la raison pour laquelle cette page a été créée afin de montrer l‘importance du travail de la mémoire et partager les idées de ce qu’il est possible de faire dans ce domaine. Par exemple : aller à la rencontre des anciens pour rechercher photos et témoignages, créer des expositions grand public pour mettre en relation les images de nos pratiques agricoles locales d’il y a 50 ans voire 100 ans, avec les nouvelles techniques proposées par la permaculture et l’agroécologie aujourd’hui.

“Les jardins rochelais d’hier à aujourd’hui”

Alors que le succès des grainothèques est reconnu dans plus de 400 villes en France aujourd’hui, grâce au remarquable travail de l’association Graines de Troc, il serait bon qu’une nouvelle action pédagogique voie le jour, dans nos bibliothèques municipales, nos centres sociaux culturels, nos écoles, nos universités, nos maisons de retraites, nos mairies, nos hôtels de département, pour réaliser des expositions pédagogiques sur le travail de la mémoire de notre patrimoine maraîcher et fruitier sur le territoire.

L’exemple réussi avec les Incroyables Comestibles à la Rochelle est à souligner, où une exposition (photos ci-dessus) a permis de rassembler des photos et des témoignages de pratiques maraîchères sur cette commune, 100 ans en arrière, en juxtaposition avec l’agriculture urbaine 3.0 en mode open-source pratiquée dans la ville aujourd’hui. La présence de bacs de nourriture à partager dans une bibliothèque universitaire crée une présence positive et forte du végétal comestible dans notre monde confiné du numérique et des nouvelles technologies. Si nous avons besoin de ces dernières pour diffuser la connaissance, l’autonomie alimentaire passera toujours par notre relation harmonieuse dans le soin à la Terre.

Voici des précisions sur l’exposition de la Rochelle.

Exposition mémoire à la bibliothèque universitaire de La Rochelle : “Les jardins rochelais d’hier à aujourd’hui”
Chaque jardin a ses particularités, il est le reflet du climat, du sol et du jardinier. Les animaux se regroupent là où ils trouvent nourriture et abris adaptés à leurs besoins. Une pratique bien réfléchie favorise donc une grande diversité d’espèces. En coopération avec les associations Incroyables comestibles et A fleur de marée ainsi qu’en partenariat avec la Ligue de Protection des Oiseaux, la Bibliothèque Universitaire de La Rochelle a invité la population à découvrir une série d’expositions autour de cette thématique.
Jardins nourriciers urbains : hier, aujourd’hui, demain
Proposée par l’association « Incroyables comestibles », cette exposition a été organisée à partir de photos anciennes sur les jardins et l’agriculture locale, issues des fonds de la Médiathèque Michel-Crépeau et des Archives municipales de La Rochelle, accompagnées de photos plus récentes et de projections sur les jardins de demain. Les Incroyables comestibles ont par ailleurs installé dans le patio de la BU, trois jardinières de nourriture à partager.
Un jardin nature
Proposée par la Ligue de Protection des Oiseaux, cette exposition a permis de découvrir les principaux aménagements naturels favorisant la faune et la flore sauvages des jardins.
Mon herbier savoureux
Proposée par Anne Richard, naturaliste, ingénieur en agriculture spécialisée en botanique et membre de l’association « A fleur de marée », cette exposition a permis de découvrir au fil de 20 planches-photos, la graine, le bourgeon, la jeune pousse, la plante entière, la fleur, des végétaux comestibles de nos jardins.