21 – Plantations d’arbres et forêts comestibles

 

Comment créer une forêt urbaine comestible en permaculture avec l’aide d’une démarche participative citoyenne ?

À partir de l’observation des premières expériences de création de forêts urbaines comestibles à l’instar de Beacon Food Forest à Seattle depuis 2011 ainsi que des autres programmes qui ont suivi ici et là dans le monde, il est possible aujourd’hui de proposer la méthode suivante comme hypothèse de travail pour lancer un pareil programme.

Étape 1 – L’hypothèse de travail

Cette première étape permet de rassembler les éléments de faisabilité du projet pour constituer une hypothèse de travail. On retiendra :

l’identification du terrain apte à recevoir la forêt comestible, de préférence sur un espace public avec l’autorisation des services concernés (villes, délaissés de routes, réseau ferré, campus, hôpital…);
l’inventaire des ressources disponibles à mobiliser dans la durée pour porter et accompagner le projet (coordination, expertise de design en permaculture, pépinière de reproduction, matériels de jardinage, moyens financiers disponibles ou mobilisables par un financement participatif…);
la vision du projet à terme avec les grandes orientations du but à atteindre et des publics concernés en imaginant ce qu’il serait possible de faire au vu du potentiel du lieu et de son environnement. Il est important de préciser à ce stade, les spécificités du programme qui peut avoir plusieurs fonctions précises : des fonctions ludiques et/ou récréatives, thérapeutiques, touristiques, paysagères, économiques, sociales dans un but d’insertion, pédagogiques dans un but d’apprentissage et de formation, ou encore naturalistes pour la restauration de la biodiversité et la sauvegarde de variétés fruitières anciennes du terroir.

Étape 2 – La concertation / communication

Le seconde étape du projet est à mener à quatre niveaux :

  • 1 – Avec les représentants des pouvoirs publics pour présenter la vision et obtenir l’accord de la mise à disposition du terrain par le biais d’une convention de partenariat.
  • 2 – Avec les partenaires techniques pour obtenir les soutiens professionnels nécessaires à la réalisation du programme envisagé.
  • 3 – Avec les participants. Ces derniers peuvent être des populations de voisinage direct comme ce peut être des personnes intéressées venant de la région ou de plus loin, et souhaitant participer à l’expérience pour se former. Dans ce cas précisément, il y a lieu de prévoir des hébergements ou une forme de possibilité de camping avec commodités (point d’eau et toilettes sèches). En ce qui concerne les habitants de la commune, plus la concertation sera approfondie, plus l’implication sera facilitée au moment du démarrage du programme.
  • 4 – Avec les media locaux. Le caractère novateur d’une forêt comestible de permaculture facilite la relation avec les journalistes qui seront ravis de faire écho de l’initiative sur le territoire. En cas de besoin il est recommandé de se faire accompagner par une personne compétente en communication institutionnelle pour trouver le bon dosage entre les relations publiques et les relations avec les media.

Étape 3 – La conception

La troisième étape du projet concerne la création du design de permaculture.
Deux grands cas de figure sont à prévoir :
– soit le terrain est déjà boisé, on envisagera dans ce cas un développement progressif de la transformation paysagère avec des essences fruitières,
– soit le terrain n’est pas boisé, il conviendra alors de dessiner entièrement le projet d’aménagement. Il est recommandé dans un cas comme dans l’autre, d’avoir recours à un permaculteur professionnel pour mettre au point le design du projet à partir de la configuration des lieux.
Une fois l’hypothèse de travail définie, il est bon d’organiser des réunions de présentation aussi bien au propriétaire des lieux qu’aux acteurs intéressés à participer à l’expérience de plantation. Des ajustements judicieux pourront avoir lieu grâce au dialogue engagé avec les uns et les autres, conduisant à un design définitif pour le programme.

Étape 4 – L’aménagement

Cette étape 4 peut être plus ou moins longue dans le temps en fonction de la surface du chantier et de l’importance des ressources à mobiliser. Ce qui est intéressant avec la permaculture, c’est que toutes les surfaces sont bonnes à prendre, les grandes comme les petites. On peut aussi bien engager un programme participatif sur un chantier de plus de 3 ha comme celui de Seattle ou de moins de 5 000m2 pour reprendre le cas de « la forêt qui se mange » à Grande-Synthe. La bonne nouvelle, c’est que l’on peut même envisager une mini forêt comestible très dense sur un jardin mandala de 500 m2. Voir pour ce cas, l’expérience pilote menée par Louis Poirée, lepotagiste.com en Seine-Maritime.

Photo – Vue d’un aspect de la forêt-jardin comestible en mars 2017, laboratoire conçu par Louis Poirée, à quelques kilomètres de Rouen. Cette forêt promet d’être d’une très grande densité d’arbres et arbustes comestibles sur une toute petite surface.

Étape 5 – L’animation

Cette dernière étape est fondamentale. Elle est à prendre en compte et à soigner particulièrement tout au long du projet pour lui conférer un caractère convivial et joyeux. C’est cette convivialité qui permettra de fidéliser les participants dans la durée. C’est un des aspects de base de la permaculture, une des clés de réussite.
Dans ces nouvelles formes de démarche participative, la qualité des relations entre les acteurs est tout aussi importante que le contenu technique du projet qui est développé, à savoir la culture forestière comestible. Concrètement, on pourra retenir des idées d’aménagement comme la construction d’une rotonde qui permettra aux participants de se retrouver à l’abri de la pluie, au sec, autour d’un feu, avec des musiciens pour passer d’agréables moments après les travaux de plantations. On apportera un soin particulier à la nourriture avec la possibilité de cuisiner de manière confortable dans la durée, surtout si le chantier reçoit des participants pendant plusieurs mois.
Un autre aspect essentiel à prendre en compte est la signalétique, avec la mise en place de panneaux d’informations pédagogiques concernant l’ensemble des travaux, faisant de cette forêt comestible, une véritable école du jardinage et le paysage urbain.
Un grand panneau d’accueil à l’entrée du site avec  le titre, l’illustration du design et quelques lignes d’explication est à retenir également pour positionner le chantier participatif dans l’espace public et ainsi renseigner tous les visiteurs qui se rendront sur le site.
L’originalité d’une forêt comestible de permaculture en milieu urbain peut susciter la curiosité, l’admiration, et même la fierté de participer à un tel projet, car il est à très haute valeur ajoutée.
Pour améliorer l’organisation du travail, il est vivement recommandé d’apposer un tableau d’expression des besoins, permettant aussi bien aux organisateurs qu’aux participants, de lister les compétences, les outils, les techniques, les idées recherchés, etc., vous serez surpris dans ce cas, de la richesse dont recèle la participation citoyenne.

Pour terminer, cette étape d’animation sera d’autant plus vivante qu’elle sera photographiée et filmée régulièrement, pour montrer l’avancée du projet. La communication dans un mode participatif a autant d’importance que les actions techniques proprement dites. En effet, si par défaut de communication vous vous retrouvez seul au beau milieu du programme au bout de quelques mois, le projet ne sera pas avancé. En partageant régulièrement sur les réseaux sociaux, les images de la beauté de la forêt qui pousse, des rires et sourires des volontaires qui participent à sa réalisation, vous donnerez envie à d’autres de vous rejoindre et de vous soutenir.

Enfin, nous pourrions dire que la forêt comestible de permaculture est avant tout un lieu de co-création, de rencontres, d’échanges, de partages, d’apprentissage et de découvertes.

Photo – Grande-Synthe – La Forêt qui se mange. Plantations des premiers arbres avec le maire et les habitants, inauguration le 25 mars 2017.

Écoutez le témoignage de Claire Mauquié ci-dessus pour comprendre comment le jardin-forêt évolue après plusieurs années de pratiques et en quoi la forêt comestible rend possible un nouvel art de vivre pour toutes les personnes qui se lancent dans cette belle aventure.

Liens pour aller plus loin : voir l’exemple du chantier participatif de “la Forêt qui se mange” à Grande-Synthe dans le département du Nord en LIEN ICI.
Le site de Claire Mauquié, “Food Forest Lab”, où vous trouverez beaucoup de ressources, c’est en LIEN ici.
Le site de “la Forêt Gourmande” qui a été créée par Fabrice Desjours à Diconne, en Saöne-et-Loire, sur une parcelle de 2,5 hectares avec plus de 1000 variétés comestibles, c’est en LIEN ici.

Rejoignez le groupe Facebook de l’action 21/21 de la feuille de route du retour à l’autonomie alimentaire : “Plantations d’arbres et forêts comestibles“.